Dr Gérald Valette : “Passer d’une médecine curative à une médecine préventive”

Interview mise à jour le 25 février 2020.

Spécialiste en oncologie ORL, ancien président du comité de lutte contre la douleur et vice-président du comité d’éthique du CHRU de Brest, le Dr Gérald Valette a plongé dans le monde du numérique. Après un parcours dans la fonction publique, il exerce en libéral et monte une start-up. A la croisée des nouveaux usages, ce chirurgien impliqué dans la qualité de la communication avec les patients, livre son point de vue  sur la réforme “Ma santé 2022”.

La suppression du numerus clausus dès la rentrée 2020 est l’une des mesures phares de cette réforme. Est-ce un atout pour les professionnels de santé ? 

De façon immédiate aucun atout pour les professionnels puisqu’il faudra 10 à 12 ans pour simplement compenser les départ actuels. Nous allons donc assister à une intensification de la non revente des patientèles. Si l’on doit retenir un avantage de cette carence annoncée depuis 20 ans, c’est la nécessaire mutation du monde de la santé dans l’optimisation du temps médical. Les médecins doivent être libérés de tâches administratives afin de soigner la population dans de bonnes conditions.

Le développement des maisons de santé et des hôpitaux de proximité va-t-il modifier la pratique des professionnels de santé sur leur territoire ? 

Les jeunes médecins sont de moins en moins tentés par une installation libérale seuls, à juste titre. Les maisons de santé sont un moyen de mutualiser les coûts d’installation et de fonctionnement, de valoriser le travail d’équipe en n’étant plus isolé dans sa pratique, ce qui rejoint finalement un désir des patients d’avoir une prise en charge dans une unité de lieu. Ces structures de santé permettent aussi d’avoir une plus grande lisibilité de l’offre de soin sur un territoire.

En ce qui concerne les hôpitaux de proximité, le challenge est de savoir quels types de prestations sont gardées à proximité. L’évolution se fait vers des structures qui ont des capacités de dépistage et de convalescence après un traitement réalisé dans un centre de référence régional public ou privé.

On parle de digitalisation du parcours de soin (création du dossier médical partagé, télémédecine), quels avantages pour les professionnels de santé et les patients ? 

De façon plus large c’est la place du numérique en santé qui nous interroge. Le corps médical a longtemps été très en retard sur cette thématique. Malgré une prise de conscience, c’est la résistance au changement qui est dorénavant sur le devant de la scène.

L’échange d’information entre tous les praticiens de santé en temps réel est un enjeu majeur, mais aussi le suivi des pathologies chroniques grâce à des applications ad hoc validées. La mutation d’un système de soins hospitalo-centré vers un système patient-centré est une évolution nécessaire qui fera entrer la médecine dans une ère résolument moderne. Le numérique n’est pas en opposition avec la relation patient mais au contraire sera complémentaire en libérant du temps au praticien de santé.

Quels sont les enjeux de la santé de « demain » pour les professionnels médicaux et paramédicaux ?

La médecine est à un tournant, de nouveaux usages ont traversés la société. Les patients ont accès à un puit d’informations sans limites sur le net. Le rôle du praticien de santé “sachant” va devoir se déplacer vers le praticien de santé “accompagnant” en validant l’information transmise et en orientant la prise en charge. Dès lors deux thématiques pointent le nez : la prévention et le dépistage. 

Ce sont pour moi les enjeux majeurs de la médecine de demain : passer d’une médecine curative à une médecine préventive dans laquelle tout le monde sera gagnant.