L’entorse de cheville, 3ème cause de consultation aux urgences

Publié le 25 août 2020.

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Le Dr Jonathan BENOIST est un chirurgien spécialisé dans la chirurgie du pied et de la cheville. Il est installé au CHP Saint Grégoire situé près de Rennes depuis 2015. Il participe activement, au sein de la société française d’arthroscopie, au développement de nouvelles techniques chirurgicales sous arthroscopie pour la chirurgie de la cheville.

Une entorse peut rester douloureuse à distance de l’épisode initial. Lorsque la douleur persiste plus de six mois, il est nécessaire de refaire le point avec le patient cliniquement et radiologiquement. Le premier diagnostic à évoquer est bien évidemment une lésion ligamentaire de la cheville. S’il n’existe pas de laxité, il faudra s’orienter vers des diagnostics différentiels qu’il faut connaître.

Le diagnostic de conflit post traumatique

Le plus fréquemment retrouvé est le diagnostic de conflit post traumatique. Il peut être de deux  origines : tissulaire ou osseux.

Le conflit osseux

Le conflit osseux se retrouve essentiellement chez le patient pratiquant des sports de ballon. La douleur va être située sur la face antérieure de la cheville et être augmentée en flexion dorsale. Elle se produit le plus souvent lors de la reprise du sport mais n’est pas gênante à la marche. Elle est liée à l’inflammation provoquée par un conflit entre la face antérieure du tibia et le col du talus. La radiographie de profil permet facilement de faire le diagnostic (Figure 1).

Le traitement de première intention est une infiltration de corticoïde et le traitement chirurgical ne sera envisagé qu’en cas d’échec.

Figure 1

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Le conflit tissulaire

Le conflit tissulaire est fréquent et souvent non diagnostiqué car méconnu. Il est intimement lié à une lésion isolée du ligament talo-fibulaire antérieur. Le patient ne se plaint pas d’une instabilité mais de la persistance d’un œdème en regard de la gouttière malléolaire externe et de douleur à la marche sur terrain non plat. Ce conflit est lié à une hyper cicatrisation du ligament qui entraîne la formation d’un tissu cicatriciel dans la gouttière externe provoquant l’inflammation et donc la douleur.

Le test diagnostic est le test de Molloy qui consiste à exercer une pression dans la gouttière malléolaire externe en associant une flexion dorsale de la cheville. Ceci reproduit la douleur et confirme le diagnostic (Figure 2A /2B).

Il sera intéressant de demander une imagerie (radiographies en charge et arthroscanner de la cheville) pour rechercher une lésion ligamentaire associée.

Le traitement consistera à une infiltration de corticoïdes à visée diagnostique et thérapeutique. Un avis chirurgical peut être demandé en cas d’échec ou s’il existe une lésion ligamentaire associée.

Figure 2A >>Figure 2B

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Une autre cause de douleur post entorse est la présence d’une lésion ostéochondrale (Figure 3) en particulier du dôme talien. Le patient ressent des sensations de claquements et/ou de pseudo blocages à la cheville. Ces éléments doivent conduire à la réalisation d’examens complémentaires notamment un arthroscanner qui est le meilleur examen d’imagerie pour les lésions cartilagineuses.

Figure 3

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Chez la jeune fille présentant des douleurs chroniques après une entorse le plus souvent bénigne et/ou lorsqu’il s’agit d’un premier épisode, on peut penser à un problème de synostose/synchondrose. Il s’agit d’une fusion ou d’une ankylose d’une articulation. On la retrouve principalement au niveau de la talo-calcanéénne (Figure 4A) et de la calcanéo-naviculaire (Figure 4B).

Figure 4A

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Figure 4B

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A l’examen clinique, la douleur est localisée sur le site de la synostose/synchondrose. On retrouve souvent un pied plat valgus peu réductible. Les clichés radiologiques simples permettent de poser le diagnostic en regardant au bon endroit.

Une kinésithérapie bien entreprise et un bilan podologique peuvent permettre d’obtenir la guérison. Une infiltration et un avis chirurgical peuvent être requis en cas d’échec de ce traitement.

Le syndrome du sinus du tarse

Le syndrome du sinus du tarse est une pathologie rare. Elle se manifeste par des douleurs sur le bord externe du pied en regard du sinus du tarse et accentué lorsqu’on exerce une pression en son sein. Il se situe approximativement 2 cm en avant de la pointe de la malléole externe. Il s’agit d’un diagnostic d’élimination du fait de sa rareté. L’IRM est la seule imagerie permettant le diagnostic avec la scintigraphie osseuse.

Le syndrome du carrefour postérieur

On peut enfin évoquer le syndrome du carrefour postérieur. La douleur de celui-ci est plutôt caractéristique se situant en rétro malléolaire externe ou interne. Le test diagnostic consiste à la mise en flexion plantaire maximale de la cheville ce qui reproduit les symptômes en rétro malléolaire. On cherchera à la radiographie de profil la présence d’un os trigone ou d’une queue du talus proéminente favorisant ce syndrome (Figure 5).

L’IRM ou la scintigraphie osseuse permettent de confirmer le diagnostic.

On le traite fréquemment avec de la kinésithérapie et une infiltration de corticoïdes. La chirurgie arthroscopique permet de traiter les cas récalcitrants.

Figure 5

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Un examen clinique primordial

Pour résumer, l’examen clinique est primordial dans ces cas complexes de douleurs persistantes post entorse. En fonction de la localisation de la douleur et des tests cliniques, le bilan radiologique pourra être prescrit et un traitement médical envisagé avant un éventuel avis spécialisé.

Le bilan de base devra comprendre :

– Radiographies EN CHARGE : Méary + Profil,

– Arthroscanner ou IRM en fonction de la pathologie recherchée.

Entorse de la cheville : grave ou pas grave ?